Esaïe 9:6
Esaïe 9:6 déclare : " Car un enfant nous est né, un fils nous a été donné ; et la domination princière sera sur son épaule. Et on l’appellera du nom de Conseiller merveilleux, Dieu fort, Père éternel, Prince de paix."
C'est ainsi que ce texte des Saintes Ecritures est rendu dans la Traduction du monde nouveau, des Témoins de Jéhovah. Les TdeJ sont des anti-trinitaires notoires. Pourtant, on ne peut leur repprocher d'avoir essayer de falsifier ce passage : ils l'ont traduit comme la majorité des autres traducteurs de la chrétienté. Même la majuscule à " Dieu fort " est respectée.
CE QU'EN DISENT LES TÉMOINS DE JÉHOVAH
Comme chacun sait, ce texte prophétique parle du Messie, Jésus, ce que les TdeJ eux-mêmes reconnaissent. Dans leurs livres La prophétie d'Isaïe : lumière pour tous les humains (étude en deux tomes qui examine verset par verset l'ensemble de ce livre du prophète), nous pouvons lire :
" À sa naissance miraculeuse, celui qui deviendrait le Messie reçut le nom de Jésus, qui signifie " Jéhovah est salut ". Mais il possède d’autres noms, des noms prophétiques qui évoquent son rôle essentiel et sa position élevée. L’un de ces noms est Emmanuel, qui a pour sens " Avec nous est Dieu ". (Isaïe 7:14, note.) Isaïe détaille à présent un autre nom prophétique : " Un enfant nous est né, un fils nous a été donné ; et la domination princière sera sur son épaule. Et on l’appellera du nom de Conseiller merveilleux, Dieu fort, Père éternel, Prince de paix. " (Isaïe 9:6). Attardons-nous sur la richesse du sens de ce nom prophétique multiple. "
Comment les TdeJ expliquent-ils que le titre " Dieu fort " est donné prophétiquement à Jésus? Sous le sous-titre " Dieu fort " et " Père éternel ", nous trouvons ce commentaire :
" Jésus est également appelé " Dieu fort " et " Père éternel ". Cela ne veut pas dire qu’il usurpe l’autorité et la position de Jéhovah, qui est " Dieu notre Père ". (2 Corinthiens 1:2.) Il " n’a pas songé à une usurpation, c’est-à-dire : pour qu’il soit égal à Dieu ". (Philippiens 2:6.) Il est appelé Dieu fort, et non Dieu Tout-Puissant. Jésus ne s’est jamais considéré comme le Dieu Tout-Puissant ; il a en effet dit de son Père qu’il était " le seul vrai Dieu ", c’est-à-dire le seul Dieu qu’on doive adorer (Jean 17:3 ; Révélation 4:11). Dans les Écritures, le mot " dieu " peut vouloir dire " puissant " ou " fort ". (Exode 12:12 ; Psaume 8:5 ; 2 Corinthiens 4:4.) Avant de venir sur la terre, Jésus était " un dieu ", " se trouvant dans la forme de Dieu ". Après sa résurrection, il retourna dans les cieux où il reçut une position encore plus élevée (Jean 1:1 ; Philippiens 2:6-11). En outre, le terme " dieu " implique une autre idée. En Israël, les juges étaient appelés " dieux " ; ils le furent même une fois par Jésus en personne (Psaume 82:6 ; Jean 10:35). Jésus est le Juge, établi par Jéhovah, " qui doit juger les vivants et les morts ". (2 Timothée 4:1 ; Jean 5:30.) En somme, il porte bien le nom de Dieu fort.
Le titre de " Père éternel " se rapporte à la puissance et au pouvoir que détient le Roi messianique de donner aux humains la perspective de vivre éternellement sur la terre (Jean 11:25, 26). Notre premier père, Adam, nous a légué la mort. Jésus, le dernier Adam, " est devenu un esprit donnant la vie ". (1 Corinthiens 15:22, 45 ; Romains 5:12, 18.) De même que Jésus, le Père éternel, vivra toujours, de même les humains obéissants profiteront éternellement des bienfaits de sa paternité. — Romains 6:9. "
Est-il utile de préciser que ces explications ne sont pas du goût de tous ? Reprenons quelques-uns des arguments avancés par les TdeJ.
JÉSUS : DIEU FORT
Ce titre, " le Dieu fort " est attribué à Jéhovah en Isaïe 10:21 (TMN). L'expression " le Dieu fort " traduit l'hébreu ’Él gibbôr, qui peut aussi être traduit par " Divin fort ".
Supposons, pour le besoin de notre étude, que Jésus soit une créature de Dieu, comme l'affirment les TdeJ. Cette créature, nécessairement inférieure à son Créateur, Jéhovah, pourrait-elle légitimement porter ce titre de " Dieu fort " ? Le Créateur, Jéhovah, accepterait-il de donner à l'une de ses créatures ce titre honorifique particulièrement élevé ?
Vous conviendrez que ce n'est pas à nous de dire ce que Dieu peut faire. Toutefois, nous savons que Dieu est un Dieu jaloux, qui ne donne sa gloire à personne (Exode 34:14 ; Deutéronome 4:24 ; Isaïe 42:8). De cette connaissance, nous pouvons déduire sans risque de nous tromper que Dieu se réserve certaines prérogatives et certains titres qu'il ne donnera jamais à personne.
Le titre " Dieu fort " fait-il partie des titres en question ? Si oui, le fait même que Jésus porte ce titre fait de lui l'égal de Dieu, ce qui serait un argument de poid considérable pour prouver la Trinité.
Or, considérez ceci : Dans le texte hébreu, le terme Shadday se rencontre sept fois précédé de ’Él (Dieu), ce qui donne le titre " Dieu Tout-Puissant ". (Genèse 17:1 ; 28:3 ; 35:11 ; 43:14 ; 48:3 ; Exode 6:3 ; Ézéchiel 10:5.) Dans tout ces textes, ce titre s'applique exclusivement à Dieu, Jéhovah.
En grec, l'équivalent de Shadday est Pantokratôr. Que ces deux mots sont équivalents nous est confirmé par 2Corinthiens 6:18 Dans ce texte, Paul cite les Écritures hébraïques lorsqu’il exhorte les chrétiens à se garder du faux culte et des idoles sans vie et sans force, pour être aptes à devenir enfants du " Tout-Puissant [Pantokratôr] ". Au vu des déclarations de l’apôtre, ce titre s’applique ici de manière évidente à Jéhovah.
Les neufs autres utilisations de ce mot grec, Pantokratôr, apparaissent toutes dans le livre de l'Apocalypse (ou Révélation). Chacune de ces occurences désignent sans l'ombre d'un doute le Créateur, Dieu, Jéhovah (Apocalypse 1:8 ; 4:8 ; 11:17, 18 ; 16:14 ; 15:3 ; 16:5-7 ; 19:6, 13-16 ; 21:22 Segond).
Nous constatons donc que ’Él Shadday, " Dieu Tout-Puissant ", est à l'usage exclusif de Jéhovah, contrairement à ’Élgibbôr, " Dieu fort ", qui est attribué tant à Dieu qu'à son Oint, ou Messie, Jésus. Or, il facile de comprendre que le titre " Dieu Tout-Puissant " est bien plus impressionnant que celui de " Dieu fort. " On peut être fort sans être Tout-Puissant. Ce dernier titre met donc Jéhovah à part. C'est un titre qu'il se réserve exclusivement. Ce titre n'est jamais attribué à Jésus.
Par conséquent, rien dans les Ecritures n'interdit de dire qu'une créature de Dieu, en l'occurence son Fils, puisse porter ce titre supérieur, mais non suprème, de " Dieu fort. "
Mais que dire du titre Dieu avec une majuscule ? En vérité, on ne peut pas dire que cela soit significatif. Comme Conseiller merveilleux ou Prince depaix, ce mot est un titre et il est normal que les traducteurs le signalent en mettant des majuscules (qui n'existent ni en hébreu ni en grec). Certes, la Septante met ho théos (le Dieu), comme pour Jéhovah. Mais Satan le Diable lui-même est appelé ho théos en 2Corinthiens 4:4. Et comme le font remarquer les TdeJ dans leur commentaire, même des humains ont été qualifiés de dieux ou Dieu dans la Bible, sans que la confusion soit cependant possible entre eux et le Créateur, Jéhovah (voir Psaumes 82:6 ; Jean 10:34 à 36 ; Exode 4:14, 16 ; 7:1 (En Exode 4:16, c'est Moïse qui est qualifié par Jéhovah de " Dieu " ; Hébreux : lé’lohim, " Dieu " avec un pluriel de majesté). Si donc des humains mortels reçoivent ce titre de la bouche même de Dieu, faut-il être surpris que Son propre Fils, le Christ Jésus, celui qui tient une si grande place dans le dessein de notre Créateur, porte le titre de " Dieu " ou " fort "? Certainement pas.
Pour plus d'informations sur cette question, je vous invite à lire l'étude intitulée Définition du monothéisme biblique.
JÉSUS : PÈRE ÉTERNEL
Bibliquement parlant, Jésus, une créature, pourrait-il être appelé " Père éternel " sans être le Dieu Tout-Puissant ? Décomposons ce titre. Qu'en est-il du mot " Père "?
Reprenons ce que les TdeJ disent sur cet aspect du Nom donné prophétiquement à Jésus :
" Le titre de " Père éternel " se rapporte à la puissance et au pouvoir que détient le Roi messianique de donner aux humains la perspective de vivre éternellement sur la terre (Jean 11:25, 26). Notre premier père, Adam, nous a légué la mort. Jésus, le dernier Adam, " est devenu un esprit donnant la vie ". (1 Corinthiens 15:22, 45 ; Romains 5:12, 18.) De même que Jésus, le Père éternel, vivra toujours, de même les humains obéissants profiteront éternellement des bienfaits de sa paternité. — Romains 6:9. "
Ce raisonnement se tient. Nous sommes tous fils et fille d'Adam, notre père. Mais ce dernier nous a " vendu sous le péché " (Romains 7:14 TMN ; voir aussi Darby et note). Nous sommes véritablement ' esclaves du péché ' (Jean 8:34 ; Romains 6:16). Jésus, grâce à sa mort, nous a libéré de cet esclavage : il nous a racheté. Il est donc devenu notre père, par adoption. Jésus est en quelque sorte un second Adam pour nous, un second père (I Corinthiens 15:45).
Jésus est " éternel. " Cela veut-il dire qu'il existe depuis toujours ? Pas nécessairement. Jésus promet à ses disciples la vie éternelle (Jean 17:3). Celui qui reçoit ce prix est alors éternel, mais cela ne signifie pas qu'il n'a pas eu de commencement. Avant que nous ne venions au monde nous n'existions pas. De même Jésus peut être éternel, maintenant, tout en ayant vu le jour à un moment donné, par un acte créateur de Dieu.
Cette question mérite donc d'être approfondie. Nous en reparlerons quand il s'agira d'examiner des passages comme Apocalypse 3:14 et Colossiens 1:15, que les TdeJ utilisent pour démontrer que Jésus a eu un commencement.
Pour l'instant, relevons ceci : Jésus n'a-t-il pas dit : " Un seul est votre Père, le Céleste." (Matthieu 23:9 TMN) Comment donc Jésus pourrait-il être notre Père éternel sans être Dieu ?
Remarquons tout d'abord que les paroles de Jésus sont plus exactement celles-ci : " En outre, n’appelez personne votre père sur la terre, car un seul est votre Père, le Céleste. " La Parole vivante (transcription de Kuen) rend ce texte d’une manière similaire: "Ne donnez pas (...) à quelqu’un, ici-bas, le titre de ‘Père’."
Selon le contexte de ce verset, Jésus condamne les Pharisiens, une secte marquante du judaïsme. Leur religion était celle de l’ostentation — comme en témoignaient leur style de vêtements, leur manière d’occuper les places les plus en vue dans les repas, de rechercher les premiers sièges dans les synagogues et de se faire appeler par des titres honorifiques. Ils allaient jusqu’à exiger un plus grand respect que celui accordé aux parents (Matthieu 23:5 à 7 ; Luc 11:43). Ils voulaient être appelés "pères". Cependant, Jésus montre que ses disciples sont tous égaux: ils sont fils de Dieu. Employer tout titre qui suggère le contraire, c’est usurper avec arrogance une position qui appartient à Dieu; aussi Jésus interdit-il l’utilisation du mot "père" comme titre honorifique religieux. Il insiste sur le fait que ses disciples n’ont qu’un seul Père dans la foi, Dieu, Jéhovah.
Replacé dans son contexte, ce verset ne concerne donc pas Jésus dans son rôle de Rédempteur. Par contre, il est clair que Jésus interdit d’appliquer à des humains le mot " père " en tant que titre formaliste ou religieux. Entre-parenthèse, on peut dès lors se demander pourquoi les ecclésiastiques et leurs ouailles désobéissent à ce commandement du Seigneur Jésus Christ. Le titre " père " est largement employé chez les catholiques et les anglicans. Même le terme abbé dérive d’un mot araméen signifiant " père ". Et le pape? N'est-il pas généralement appelé "Saint-Père"? Dans son entourage, c’est même le titre de Santissimo Padre qui lui est souvent conféré, lequel signifie "Très Saint-Père". Le titre "Père saint" n’apparaît qu’une seule fois dans la Bible (Jean 17:11). Ce titre appartenant exclusivement à l’Être suprême, convient-il que des créatures — terrestres et imparfaites — le reçoivent? Mais c'est un autre sujet... alors refermons cette parenthèse.
CONCLUSION
Quoi qu'on en dise, ce texte prophétique de Esaïe 9:6 concernant Jésus ne prouve pas qu'il est le Dieu-Tout-Puissant — ’Él Shadday, titre attribué à Jéhovah seul. Certes, Jésus reçoit le même titre — ’Él gibbôr, Dieu fort — que Jéhovah. Certes il possède lui aussi le titre de Père, comme Dieu le Créateur. Mais le fait que ces deux personnages portent tout deux des titres identiques ne prouvent pas nécessairement qu'ils ne sont qu'un.
Nébucadnezzar et Jésus Christ sont tout deux appelés " roi des rois " dans la Bible, pourtant personne n'en conclue que l'un est l'autre (Daniel 2:37; Apocalypse. 17:14, Segond). On peut aussi citer l'expression " lumière du monde " qui qualifie Jésus et aussi ses disciples (Matthieu 5:14; Jean 8:12, Segond). Mais le premier n'inclue pas tous les autres.
Quand un certain titre ou qualificatif apparaît à plusieurs reprises dans les Écritures, il ne faut donc pas en conclure hâtivement qu’il doit toujours s’appliquer à la même personne. Pour d'autres exemples, consultez les versets suivants : sauveur >> Isaïe 43:3 ; Tite 3:6 ; Juges 3:9, 15 ; Isaïe 19:20 ; juge >> Psaume 75:7 ; Juges 2:16 ; Actes 10:42 ; Jean 5:22 ; berger >> Psaume 23:1 ; Jean 10:11 ; Isaïe 44:28 ; Ezékiel 34:23 ; seigneur >> Actes 2:34, 36 ; Deutéronome 10:17 ; 1Pierre 3:6 etc...
Par conséquent, pour moi le fait est clair : Esaïe 9:6 est insuffisant pour prouver la Trinité.